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« Le Covid-19 ne peut pas m’empêcher d’aller sur le terrain. J’ai besoin d’être payé pour survivre en ces temps difficiles où le gouvernement ne fait rien pour aider ceux qui n’ont rien. Et puis, il ne faut pas oublier que nous avons fait des recherches de terrain sur Ébola, Cholera, etc. Pire, nous sommes partis faire nos recherches dans des zones de guerre risquant notre vie. Face à tout cela, Covid-19 n’est rien ».
— Assistant de recherche congolais, Bukavu, Mars 2020.

Au printemps 2019, le musée d’Orsay à Paris a présenté une exceptionnelle collection d’art colonial intitulée Black Models: From Géricault to Matisse1En collaboration avec The Miriam and Ira D. Wallach Art Gallery et Columbia University.. Dans cette exposition des portraits du dix-neuvième siècle essentiellement, on pouvait admirer la volonté d’humaniser une peinture mettant en scène l’exotisme, le racisme et la propagande coloniale. Mais cette peinture ne permettait pas de voir ni d’imaginer ces corps noirs au travail inhumain qui était pourtant le rôle central auquel ils étaient automatiquement identifiés2Par le mécanisme d’introjection freudienne visible dans le processus de la mélancolie, voir : Sigmund Freud, Group Psychology and the Analysis of the Ego (London and Vienna: International Psycho-Analytical Press, 1922).. L’exposition Black Models est une représentation analogue de la relation coloniale qui a frappé les sciences sociales depuis quatre siècles, et qui a souvent rendu invisible le travail des chercheurs locaux du Sud global. Ces parallèles sont particulièrement évidents dans la répartition inégale et raciale des rôles et des vulnérabilités sur les terrains difficiles. Cette inégalité des conditions donne lieu à un monologue universaliste que commencent déjà à sublimer les sciences sociales quant aux prévisions post-Covid-19.

On repère les origines de cette face cachée des sciences sociales dans des photographies du 19e qu’on retrouve dans une exposition amateur faite à Bukavu en juin 2018. Sur ces photos, des noirs anonymes portent, sur des brancards, des explorateurs blancs qui sont à la découverte de l’Afrique. Ces hommes blancs victorieux en apparence étaient en réalité dépendants des muscles noirs qui les aidaient à parcourir des « terrains hostiles » pour l’évangile et la science. Cette esthétique des corps exploités au nom de la progression scientifique a fait l’objet d’une exposition des caricatures de l’artiste congolais Tembo Kash à l’Université catholique de Louvain en mars 2020. Des dizaines de témoignages d’assistants de recherche africains qui sont exposés quotidiennement aux dangers d’un travail de terrain difficile dans le cadre de projets de recherche financés par des universitaires occidentaux ont amplifié l’objectif des caricatures.

Comme dans les Black Models, Kash voulait mettre des visages et des noms sur ces assistants de recherche pour réhabiliter leur humanité. Mais en même temps, il n’a pas pu cacher le lien entre les conditions de travail de ces assistants et ces photographies du 19e siècle. En effet, lorsqu’il s’agit de braver les dangers des terrains « difficiles » en Afrique, ces assistants de recherche constituent une sorte d’extension des corps de chercheurs du Nord global. Ce sont des corps-instruments qui prolongent l’accès des chercheurs occidentaux sur des terrains difficiles. Kash montre ainsi ce paradoxe de la modernité occidentale dont font partie les sciences sociales : une fascination fétichiste pour le discours humaniste3Comme un discours qui défend un ensemble de valeurs visant l’épanouissement et l’émancipation de l’homme. Voir Léopold Sédar Senghor, Liberté 1: Négritude et humanisme, discours, conférences. Le Seuil, 1964. et en même temps, le refus de renoncer à des privilèges qui sont la condition d’infériorisation et d’oppression des marginaux.

Dans ce contexte, le Covid-19 pose la question de savoir : comment ces corps-instruments vont-ils continuer à être utilisés pour collecter les données dans des contextes dangereux et difficiles en Afrique ? Covid-19 est une opportunité pour questionner le nouveau discours des chercheurs du nord4Qu’ils soient naïfs, stratégiques ou contraints par le système de production des savoirs. qui commanditent les recherches au sud. Pour les assistants de recherche, ce nouveau discours n’est qu’un monologue schizophrénique au sens des Black Models. Pour eux, Covid-19 n’est pas un « événement »5Evénement” au sens foucaldien et référant à « l’irruption d’une singularité historique ». Voir: Michel Foucault, “What is Enlightenment?” in The Foucault Reader, ed. Paul Rabinow, (New York: Pantheon Books, 1984), 32-50. au sens d’un incident qui bouleverse radicalement la manière dont les choses se sont toujours déroulées. Il n’intègre pas les conditions pour un changement radical d’un phénomène d’exploitation des corps pour la science. Ces corps ont une couleur : elle est noire.

Des corps-instruments

Mars 2020, on annonce le confinement en RDC. Les artistes réagissent soudainement : ils proposent une série de ces belles peintures populaires typiques des artistes de Kinshasa. Elles représentent l’absurdité des mesures de confinement dans une société où les gens dépendent quotidiennement du travail occasionnel pour la survie.

Cette impossibilité de suivre les consignes de confinement s’observent aussi chez certains assistants de chercheurs qui ont besoin de petits contrats de recherche pour leur survie. Même si le contexte fait à ce qu’il n’y ait pas de nouveaux contrats, il y a encore des recherches en cours qui doivent être clôturées avant le décaissement de leurs soldes. Ils en ont besoin pour la survie.

Ce sont ces assistants que l’artiste Kash peint dans ses caricatures. Comme ces noirs qui portent les explorateurs coloniaux, les corps des assistants de recherche prolongent ceux des chercheurs blancs qui travaillent dans des terrains difficiles en Afrique. Ceux-ci définissent l’objet et le design de la recherche et commanditent la recherche de terrain, malgré le rôle clé que jouent les assistants de recherche africains dans la réussite de beaucoup de recherches. Ensuite, ils contrôlent les mécanismes de publication, ce qui rend invisible le travail des assistants de recherche africains malgré le rôle clé que ces derniers jouent dans la réussite d’une étude. En essayant de donner des conseils sur comment « Naviguer entre des espaces de conflits armés » en tant qu’assistant de recherche, un collègue congolais écrit :

« La collecte de données dans des espaces sécuritaires complexes exige une préparation rigoureuse ainsi que des formes de navigation adaptées (…). Si les acteurs sur le terrain viennent à assimiler le chercheur à un espion ou à voir en lui une menace à cause de l’une de ces rencontres, alors il y a lieu de craindre que tout le projet de recherche soit remis en cause. Cela peut aussi mettre la vie du chercheur en danger»6Musamba, J. « Naviguer entre des espaces de conflits armés : à quel prix ? », in La Série Bukavu. Vers la décolonisation de la recherche, eds. Aymar Nyenyezi Bisoka, An Ansoms, Koen Vlassenroot, Emery Mudinga, and Godefroid Muzalia. PUL, 2020, 81..

Dans cet extrait, le chercheur montre les difficultés et les risques que rencontrent les chercheurs du sud travaillant dans des zones dangereuses et se confrontant à la mort au quotidien. Il ne questionne pas la nécessité d’envoyer des chercheurs du sud dans ces zones rouges où les chercheurs blancs du nord ne veulent pas aller. Il inscrit ce problème dans un contexte structurel où des solutions faciles ne seraient que démagogiques. Avec sa longue expérience, ce chercheur sait que cette exposition des chercheurs africains au danger fait partie d’un système colonial7Cette colonialité consiste précisément dans l’incapacité de la rationalité occidentale à être réflexive sur ses propres conditions de production. Pourtant, cette production s’inscrit dans un ethnocentrisme occidental et « métonymique » qui prétend comprendre la totalité de l’expérience humaine sur la base d’une rationalité spécifique, tout en se considérant comme exclusive et universelle. Pour cela, voir : Traduit avec www.DeepL.com/Translator (version gratuite): Eboussi Boulaga, F. L’Affaire de la philosophie africaine. Au-delà des querelles. Karthala-éditions terroirs, 2011; De Sousa Santos, B. Epistemologies of the South : Justice Against Epistemicide. Boulder : Paradigm, 2014 ; Derrida, J. De la grammatologie. Collection Critique, 1967. plus large lié à la géopolitique de la production des savoirs fortement critiquée les dix dernières années8Routledge, 2018More Info →. Aussi, dans son analyse de relations globales de production des savoirs, cet assistant de recherche inclut sous la définition d’« assistants de recherche » tous les chercheurs du Sud qui dépendent des commissions des universitaires du Nord global. Pour lui, Covid-19 n’est pas un évènement à même de changer cette norme établie.

Image reproduite avec l’autorisation de Tembo Kash.

Monologue des puissants

Pour les chercheurs du nord, Covid-19 n’est pas non plus un événement. Il constitue plutôt un problème qui requiert une réorganisation de tout un système de production des savoirs. Il permet aux chercheurs du nord de s’exposer le moins possible aux dangers de terrain. Covid-19 constitue un défi logistique – la réduction de vols, la réticence des assureurs craignant des rapatriements coûteux, la peur des modalités de quarantaine – mais il influencera également la manière dont les chercheurs du Nord délègueront les risques du travail de terrain aux chercheurs du Sud. Comme me l’a récemment dit un chercheur du Nord :

« Avec Covid-19, nous risquons de passer encore des mois sans pouvoir aller en Afrique. Or, nous avons beaucoup de projets en cours. Nous avons aussi prévu des ateliers de restitutions où les chercheurs de terrain doivent exposer leurs résultats de recherche sur les minerais de sang et sur les groupes armés»9Un chercheur basé au Nord, Londres, avril 2020..

Dans cet extrait, ce « chercheur-bailleur » (les chercheurs qui financent des études de terrain dans le Sud global) semble considérer Covid-19 comme un problème qui concerne les chercheurs qui font le terrain. Mais il n’évite pas une forme de narcissisme occidental pour lequel les mêmes problèmes se posent de la même manière pour les chercheurs occidentaux et africains. La généralisation qui transparait dans ce monologue tente de construire une réalité fictive et, par-là, présage déjà des solutions déséquilibrées. Les corps noirs continueront alors à braver le danger des terrains difficiles dont celui du Covid-19. Comme me dit un chercheur congolais sur le terrain :

« Il n’y a rien qui change ici. Nous allons continuer à travailler normalement. Nous n’avons jamais eu ni assurance, ni des contrats de travail décents. Notre travail est précaire. Ce sont des contrats journaliers et nous avons de la chance de les avoir (…). Covid-19 changera les choses pour les gens du nord qui viennent ici et qui vont renforcer leurs mesures de protections et rien pour nous. Nous avons vu pire que Covid-19 dans nos recherches et je ne sais pas ce qu’il va changer à nos conditions ».

Ainsi, pour les chercheurs du Nord et du Sud global, l’impact de Covid-19 est un fait inscrit dans un événement plus large. Il s’agit de la colonisation qui, en sciences sociales, a toujours caractérisé le travail de terrain dans des contextes difficiles en Afrique. C’est en effet dans le racisme et la colonisation que se fonde cette instrumentalisation des corps noirs. C’est aussi là que prend appui les critiques sur la décolonisation des savoirs. Covid-19 n’est pas un événement mais un rappel de et à ces débats.

Covid-19 dans l’événement colonial

Finalement, contrairement à l’opinion répandue10Turine, R.-P. Les arts du Congo: d’hier à nos jours. La Renaissance du Livre, 2007., l’art populaire de Kinshasa qui a critiqué la riposte contre Covid-19 n’est pas un art naïf au sens d’un art amateur. Il est plutôt un art nègre11CNRS, 2011More Info →. Son rapport subversif aux perspectives, dimensions et intensités est une caractéristique d’un art vitaliste où toute reproduction du déjà-vu est absurde. Ses disproportions multiples ont pour but de capter vivement les émotions dans le but de montrer que toute œuvre artistique pointe avec intensité vers des dimensions de la vie qui devraient être émancipées.

On retrouve dans les caricatures de Kash à la fois ces fortes disproportions et ces cris pour l’émancipation face au fétichisme des savoirs sur des terrains dangereux. Ce fétichisme est contemporain à l’émergence des disciplines sociales au dix-septième siècle, lorsqu’elles étaient encore constituées des fibres de l’idéologie coloniale et raciste. La décolonisation des savoirs en ce début du 21e siècle s’est précisément construite contre l’asservissement qu’a produit le colonialisme. De ce point de vue, les débats sur les rapports entre Covid-19 et les terrains difficiles en Afrique s’inscrivent dans cette critique sur la décolonisation des savoirs. L’objet de cette critique décoloniale a été de montrer qu’après quatre siècles, il est resté ce quelque-chose de raciste dans la production des vulnérabilités sur les terrains et, plus largement, dans la production des savoirs.

Covid-19 rappelle la nécessité de prendre aux sérieux ces critiques qui posent des questions à la fois éthiques (questionner les choix des objets, des terrains et le partage racial des rôles qu’ils produisent), politiques (lutter contre la géopolitique des savoirs, les rapports de pouvoir qui la structurent et ses conséquences épistémologiques, politiques et symboliques) et épistémologiques (critiquer les conditions de validités scientifiques des données produites dans les terrains du sud dans ces conditions).

Du point de vue de la négritude, la décolonisation des savoirs n’est pas une injonction à décréter car il s’agit à la fois d’assumer les rapports de force liés à la contestation des privilèges et la force de l’élan vital émancipatrice déjà à l’œuvre dans ces rapports de force. L’injonction de décoloniser les savoirs ne devrait pas se muer en un nouvel humanitarisme où les chercheurs du nord joueraient encore aux « sauveurs » des chercheurs du sud. La décolonisation des savoirs pose un problème d’aliénation et requiert une prise de conscience et une responsabilité des chercheurs du sud dans ces rapports de force. La lutte commence d’abord en Afrique où les gouvernements doivent s’engager à mettre en place une vision, une politique cohérente et des moyens conséquents pour la recherche. Une telle ambition n’a rien de téléologique. C’est une lutte acharnée avec des hauts et des bas car elle s’attaque à des structures historiques qui ont produit la divisions nord-sud du travail scientifique et qui a beaucoup à avoir avec les privilèges et les conditions matérielles de vie des gens. A cette lutte africaine, des partenaires peuvent se joindre aux initiatives africaines mais sans jamais en minimiser les soubassements institutionnels et structurels ni les détourner en en faisant une nouvelle cause pour leur bonne conscience.

Nous pensons que les rapports entre Covid-19 et la recherche de terrain dans des contextes difficiles devrait commencer par déconstruire, sur base des privilèges, ce qu’on appelle « communauté de fieldwork-based social scientists ». Elle devrait ensuite définir les luttes des uns et des autres et les conditions d’amélioration des conditions des groupes marginaux. Cela est la condition pour penser Covid-19 en tant qu’expérience vitaliste en sciences sociales, c’est-à-dire une expérience qui pointe des aspects de vie des communautés humaines qui luttent encore pour leur émancipation. Les sciences sociales prendront-elles enfin au sérieux les critiques sur la décolonisation après Covid-19 ? Ou bien, la prétendue neutralité de la science continuera-t-elle à légitimer l’amnésie face aux réalités honteuses de la production des savoirs ?

Le temps nous le dira. Mais dans tous les cas, en persistant sur le sujet de l’émancipation, la performance artistique « sur » l’Afrique et « en » Afrique ne cessera jamais de murmurer à nos oreilles ce simple et profond appel à l’humanité de Fanon, et plus largement par la critique de la décolonisation lorsque Fanon, parlant de l’antisémitisme aux non-juifs, a déclaré : « Quand vous entendez de mauvaises choses sur le Juif, prêtez l’oreille, on parle de vous ! »12Fanon, F. Peau noire, masques blancs. Seuil, 1952, 81.. Après tout, dans la logique fanonienne, l’oppression subie par ces chercheurs du Sud a la même logique que celle de ces juifs discriminés, de ces noirs déshumanisés, de ces femmes discriminées, de ces hommes et femmes de couleur incarcérés, de ces musulmans tyrannisés, de ces travailleurs précarisés et exploités, de ces migrants clandestins, etc. Ce sont les humains produits par un phénomène du monde moderne que Mbembe a appelé le « devenir nègre du monde »13Durham, NC: Duke University Press, 2017More Info →. Ce phénomène est un « événement », et donc le principal défi pour les sciences sociales aujourd’hui.

Cet article a été traduit avec l’aide de Tatiana Carayannis.

References:

1
En collaboration avec The Miriam and Ira D. Wallach Art Gallery et Columbia University.
2
Par le mécanisme d’introjection freudienne visible dans le processus de la mélancolie, voir : Sigmund Freud, Group Psychology and the Analysis of the Ego (London and Vienna: International Psycho-Analytical Press, 1922).
3
Comme un discours qui défend un ensemble de valeurs visant l’épanouissement et l’émancipation de l’homme. Voir Léopold Sédar Senghor, Liberté 1: Négritude et humanisme, discours, conférences. Le Seuil, 1964.
4
Qu’ils soient naïfs, stratégiques ou contraints par le système de production des savoirs.
5
Evénement” au sens foucaldien et référant à « l’irruption d’une singularité historique ». Voir: Michel Foucault, “What is Enlightenment?” in The Foucault Reader, ed. Paul Rabinow, (New York: Pantheon Books, 1984), 32-50.
6
Musamba, J. « Naviguer entre des espaces de conflits armés : à quel prix ? », in La Série Bukavu. Vers la décolonisation de la recherche, eds. Aymar Nyenyezi Bisoka, An Ansoms, Koen Vlassenroot, Emery Mudinga, and Godefroid Muzalia. PUL, 2020, 81.
7
Cette colonialité consiste précisément dans l’incapacité de la rationalité occidentale à être réflexive sur ses propres conditions de production. Pourtant, cette production s’inscrit dans un ethnocentrisme occidental et « métonymique » qui prétend comprendre la totalité de l’expérience humaine sur la base d’une rationalité spécifique, tout en se considérant comme exclusive et universelle. Pour cela, voir : Traduit avec www.DeepL.com/Translator (version gratuite): Eboussi Boulaga, F. L’Affaire de la philosophie africaine. Au-delà des querelles. Karthala-éditions terroirs, 2011; De Sousa Santos, B. Epistemologies of the South : Justice Against Epistemicide. Boulder : Paradigm, 2014 ; Derrida, J. De la grammatologie. Collection Critique, 1967.
8
Routledge, 2018More Info →
9
Un chercheur basé au Nord, Londres, avril 2020.
10
Turine, R.-P. Les arts du Congo: d’hier à nos jours. La Renaissance du Livre, 2007.
11
CNRS, 2011More Info →
12
Fanon, F. Peau noire, masques blancs. Seuil, 1952, 81.
13
Durham, NC: Duke University Press, 2017More Info →